Dans le monde entier les
inondations sont synonymes de perturbations non seulement pour
l'homme mais surtout pour toutes les espèces d'oiseaux nichant près
du sol. L'article suivant paru dans ornithomedia du mois de
juin 2016 vous montre que des ornithologues du monde entier
se sont penchés sur ce problème.
Grosswoerth inondé |
Les inondations ont de graves conséquences sur les
habitants des régions touchées (routes coupées, bâtiments
emboués, cultures noyées...), mais lorsqu'elles se produisent en
mai-juin, en pleine période de reproduction, elles perturbent aussi
fortement de nombreux oiseaux : destructions des nids, noyades des
oisillons, zones d'alimentation inaccessibles... Toutefois, plusieurs
espèces parviennent à limiter les effets négatifs à court et
moyen terme de ces montées brusques du niveau de l'eau grâce à des
adaptations comportementales.
Dans un article publié en 2015 dans la revue The
Condor, des ornithologues ont présenté les résultats de leur suivi
de la nidification de deux passereaux nichant sur les rives du
réservoir Arrow en Colombie-Britannique (Canada) : la Paruline jaune
(Setophaga petechia) (272 nids suivis) et le Moucherolle des
saules (Empidonax traillii) (81 nids étudiés). Lors d'une
inondation, 28 % des nids de Parulines jaunes et 50 % de ceux de
Moucherolles des saules ont été submergés, mais paradoxalement, la
réussite globale de la nidification de ces deux espèces (mesurée
par le Taux de Survie Quotidien des nids, ou DSR en anglais) a été
peu impacté. Les auteurs supposent que l'inondation aurait réduit
la pression de prédation, ce qui a permis de compenser au moins
partiellement les effets destructeurs. D'autre part, à l'image des
grèbes qui construisent des nids insubmersibles constitués de
végétaux aquatiques (lire Parade
des Grèbes huppés : postures, danses et cérémonies), le
Moucherolle des saules niche fréquemment dans la végétation
flottante de la tourbe, ce qui permet à ses oeufs et à ses petits
de survivre aux inondations.
En Corée du Sud, des biologistes ont observé que
le nombre de couples de Sternes naines (Sternula albifrons)
nichant dans l'estuaire du fleuve Nakdong variait en fonction du
niveau de la crue de l'année précédente (neuf à dix mois plus
tôt) : plus le nombre d'oiseaux ayant été obligés de quitter leur
site de nidification était important, moins le nombre de ceux
revenant le printemps suivant était élevé. L'effectif peut
ré-augmenter ensuite progressivement les années suivantes si la
situation à chaque printemps demeure favorable. Il s'agit donc là
d'une adaptation pour maintenir la population de l'espèce.
Le Bruant à queue aiguë (Ammodramus
caudacutus) niche dans les marais salants en Amérique du Nord,
qui peuvent être submergés lors des grandes marées. Des
ornithologues ont découvert que leur période de nidification était
synchronisée avec les cycles lunaires, qui ont justement une
influence sur ces marées, ce qui leur permet d'éviter de nicher
lorsque les coefficients sont les plus élevés.
Sources- Harry van Oort, David J. Green, Matthew Hepp et John M. Cooper (2015). Do fluctuating water levels alter nest survivorship in reservoir shrubs?. The Condor. Volume : 117. Numéro : 3. Pages : 376-385. www.aoucospubs.org/doi/abs/10.1650/CONDOR-14-154.1
- Ji-Deok Jang, Seong-Gwang Chung, Kyung-Cheol Kim, Keon-Young Jeong, Dong-Kyun Kim, Ji Yoon Kim, Gea-Jae Joo et Kwang-Seuk Jeong (2013). Long-term adaptations of a migratory bird (Little Tern Sternula albifrons) to quasi-natural flooding disturbance. Ecological Informatics. Volume : 29. Numéro : 2. Pages : 166–173. Septembre. www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1574954114001216
- W. Gregory Shriver, Peter D. Vickery, Thomas P. Hodgman, and James P. Gibbs (2007). Flood tides affect breeding ecology of two sympatrics Sharp-tailed Sparrows. The Auk. Volume : 124. Numéro : 2. Pages : 552-560. www.aoucospubs.org
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